Des mesures et des calculs
Quand l’hiver est là, on peut faire quelques mesures et quelques calculs simples pour mieux connaître sa maison.
Maintenant qu’on a fait tout ce qui était raisonnablement possible avant l’hiver (voir ici, ici et ici) sans engager de gros travaux (on verra plus tard après l’hiver ceux qui pourraient être réalisés pour l’année prochaine) on va pouvoir faire des mesures pour mieux connaître sa maison. En effet, chercher à diminuer sa consommation a de nombreux avantages, mais on ne doit jamais faire l’économie d’une analyse quantitative des dépenses : changer fortement ses habitudes et se rendre la vie très compliquée ou même mettre en cause sa santé pour une économie annuelle de 10 euro n’est probablement pas un bon choix. Il faut donc savoir où faire porter l’effort pour que cela ait un effet conséquent. On peut se rapproche des principes souvent cités qui ont été développés par un désormais célèbre économiste italien au début du siècle : en agissant sur 20 % des causes on résout 80 % des problèmes. L’objectif ici est d’identifier ces 20 % qui vont nous faire gagner 80 % des économies réalisables.
Faire des mesures.
Si on est chauffé à l’électricité, on peut faire un relevé du compteur (total HP + HC si on a ce type d’abonnement). L’idéal serait de le faire toutes les semaines, le même jour à heure fixe. Plus fréquemment si c’est possible. Un des objectifs est de collecter ces données et d’essayer de les corréler avec d’autres variables : la météo de la semaine, mais aussi, le nombre d’occupants de maison, si celui-ci est variable. Habituellement, si une maison est chauffée à l’électricité, la part consacrée au chauffage peut atteindre 75% de l’énergie totale consommée dans les périodes les plus froides de l’année (voir le graphique ci dessous). Ainsi, il serait intéressant de corréler la consommation entre deux relevés avec des mesures de température extérieure ainsi qu’avec une évaluation qualitative de l’humidité du vent et de l’ensoleillement. La simple évaluation de la température moyenne de la semaine est intéressante, elle va permettre de définir une donnée caractéristique de la maison, celle qui relie ses besoins en chauffage et la température extérieure. En effet, lorsque la température extérieure est proche de la température intérieure recherchée, les besoins de chauffage sont nuls. Ensuite ils sont proportionnels à l’écart entre le température intérieure et la température extérieure. Par exemple, si la température intérieure recherchée est de 20 degrés, la consommation d’énergie pour l’obtenir à l’équilibre sera deux fois plus élevée si la température extérieure est de 0 degré que si elle est de 10 degrés. On a donc ainsi le coût de chaque degré par jour, que ce soit un degré en moins à l’extérieur ou bien un degré en plus à l’intérieur. Cette valeur est une caractéristique spécifique de la maison pour une source d’énergie donnée.
Bien sur, ce principe est valable quelque soit le moyen de chauffage, quelque soit la source d’énergie. Ici, le seul avantage de l’électricité, c’est qu’elle est plus facile à mesurer que les autres. On peut faire la même chose pour le gaz, avec l’avantage que cela permet de bien séparer les 3 usages du gaz (chauffage, ECS, et plus marginalement, la cuisine) de ceux de l’électricité.
Et de même pour les autres procédés. Le bois en bûche demandera plus de calculs, il faudra noter le nombre de paniers consommés chaque jour, toujours en relation avec la température extérieure observée.
Le résultat est alors une tableau commenté
- consommation journalière pour chaque source d’énergie
- éventuellement nombre d’occupants,
- température extérieure et éventuellement une évaluation qualitative humidité /vent /ensoleillement
Normalement on devrait avoir quelque chose comme cela ,
qui est un modèle basé sur l’hypothèse d’un usage 100 % électrique, avec 50 % de chauffage et 50 % pour l’ensemble des autres usages (ECS comprise à 15%). C’est une situation de profil de consommation saisonnier qu’on rencontre fréquemment. Ici, dans ce modèle on constate que pendant les mois les plus froids, décembre et janvier, 75 % de l’énergie consommée est utilisée pour le chauffage.
Une fois qu’on connaît sa consommation, en fonction des paramètres météo extérieurs, on peut mieux évaluer l’effet de décisions telles que remplacer un combustible par un autre, modifier la température recherchée à partir de l’estimation de la valeur en kW.h (et en euro) de la variation d’un degré de température pour une journée et pour un combustible donné. Cela permet de prendre des décision plus logiques.
Exemple de question qu’on peut résoudre : combien est-ce que cela fait économiser de choisir de se chauffer au bois ?
Premier exemple
Il s’agit d’une maison de 80 m2, plutôt bien isolée, située à 1200 m d’altitude, pour un mois de décembre. La température extérieure moyenne est de 0 degrés.
Un fonctionement 100% électrique à l’équilibre (pas de variation de la température intérieure qui est fixée à 21°. La consommation est alors d’environ 90 kW.h/jour (13,50 euro) dont 80 kw.h pour le chauffage seul (12 euro). Elle est mesurée directement au compteur.
On teste l’utilisation du bois dans une cuisinière récente : 5 paniers de 10 kg de bois par jour soit 50 kg pour maintenir cette température moyenne de 21° (avec de grosses variations à chaque flambée, ce qui est normal). Si on considère qu’un stère fait 600 kg pour 60 euro, bois coupé et fendu, alors le kg de bois vaut 0,1 euro soit une consommation de 5 euro par jour. Cependant, il faut quand même un appoint électrique de chauffage mesuré à 30 kW.h/jour (4,5 euro) même avec les 50 kg de bois (essentiellement la nuit pour maintenir la température). Avec le fonctionnement au bois, l’économie est donc de 2,5 euro/j soit 75 euro par mois (12 – 5 – 4,5 =2,5).
Pour certains, cette somme peut ne pas justifier les contraintes liées au chauffage au bois. Il est vraisemblable que beaucoup pouvaient s’attendre à un meilleur résultat pour le bois.
Sur une saison, on est donc à 300 à 400 euro d’ économie. Mais cela est valable uniquement pour la maison prise en exemple, qui, malgré quelques défauts de conception dans l’isolation, est relativement performante tout en étant située dans une région froide. Ce type de calcul peut conduire à plusieurs options possibles :
-améliorer encore l’isolation (probablement la meilleure option)
-acheter le bois en 2m de long et le débiter soi-même. Le coût est alors de l’ordre de 40 euro/stère mais cela a des inconvénients…
-ou encore renoncer au bois, accepter de payer les 75 euro/mois d’hiver
-investir dans d’autres procédés de chauffage (on y reviendra).
Une conclusion générale est que le rendement effectif du bois n’est pas aussi favorable que ce qu’on aurait pu attendre : 5 euro pour 60 kW.h cela donne du 8 centimes/kW.h, beaucoup plus que le 3,5 centimes habituellement retenu comme valeur moyenne. Ce prix est plutôt proche de celui du gaz. Il y a plusieurs explications possibles. On peut citer un prix du stère un peu trop élevé et aussi le fait que la source de chaleur étant unique, elle est mal répartie dans la maison, son efficacité est moins bonne que si elle est distribuée dans chaque pièce. Dans cet exemple, le bois est moins efficace que l’on pouvait l’espérer tout en présentant certains inconvénients que l’on a exposé ici.
Deuxième exemple de calcul
Cas du coût du maintien hors gel pendant les périodes inoccupation d’une maison. Là aussi il est intéressant de faire des mesures. Une maison inoccupée (par exemple une résidence secondaire) peut avoir des dommages si elle est amenée à subir le gel. Le principal problème est lié aux tuyauteries, surtout sur les maisons anciennes.
Prenons le cas d’une grande maison, altitude 1000 mètres, zone froide, mal exposée au sud mais assez bien isolée. Mesure de la consommation pour maintien hors gel des pièces humides pour la protection des installations de plomberie (cumulus arrêté dans local protégé hors gel). La température peut descendre à -12° avec une moyenne à – 4°. La consommation électrique pour le maintien hors gel est de l’ordre de 7 kW.h/jour soit environ 1 euro/jour. Si on considère la maison inoccupée pendant toute une saison, le coût est de l’ordre de 100 euro/saison pour éviter le risque d’un dégât sur l’installation dont les conséquences pourraient être beaucoup plus élevées. A noter que le cumulus est à l’arrêt pendant la période d’inoccupation.
Voilà, avec un simple tableau excel, des mesures hebdomadaire ou mensuelles, on a des éléments qui permettent de prendre des décisions sur des critères valables, mesurable et il est tout à fait possible que l’on soit conduit à obtenir des résultats surprenants…